Archive pour janvier 2003

Chronique

Vendredi 31 janvier 2003

Ma sacoche, mon fidèle et fameux parapluie vert et moi sommes de sortie. Je marche le long du parc. Le vent manque emporter le parapluie. Je crains un instant qu’il ne se retourne (le parapluie hein, parce que si c’est le vent ça ne change rien, ça tire juste dans l’autre sens) mais non il tient bon et mon bras aussi. Je suis invité à dîner chez Marie et Jérôme. A l’Amaretto (ce que c’est bon l’amaretto… mmmmmmm) je suis encore amarré mais déjà essouflé : j’ai essayé de monter les 6 étages en courant cette fois (matériel : un 6ème sans ascenceur et une amarre assez longue pour aller aussi haut). Au Baume de Venise nous constatons que nous partageons un mauvais karma : nous avons plus besoin de baume au coeur qu’à Venise, les choses sont mal faites ; enfin bon on partage un truc c’est déjà pas mal. Au Bourgogne les choses semblent se détendre : le rouge capiteux (de l’italien capitoso pour rester dans le ton) fait boum (à défaut de baume). Rouge sur rouge, ton sur ton (mais pas de thon au menu, ni rouge ni blanc). Au coeur de la nuit, les rires, les étoiles, le Champagne, tout pétille. Je marche dans les rues (totalement) désertes. Le vent de la nuit froide me renvoit la ballade que j’avais écrite pour toi… (c’est pour la rime avec Marie, mais en vrai ce n’est pas vrai, ce qui est normal puisqu’en vrai elle ne s’appelle pas Marie) Je m’endors bien vite.

(Epilogue : Quand le téléphone sonne à 9h30 et que la secrétaire du cabinet où j’ai fait un stage l’année dernière me dit qu’un des avocats a peut-être un plan pour un boulot et qu’elle me le passe j’ai l’impression d’être dans une coursive de sous-marin et qu’il va me falloir croiser un TGV. Avec souplesse j’esquive proprement mais en me baissant je me cogne violemment la tête contre un rail et souffre d’un mal de tête épouvantable jusqu’à la nuit. Moralité : il ne faut pas jouer près des voies ferrées, en particulier le matin.)

Qu’est-ce que tu crois (Le maillon)

Vendredi 31 janvier 2003

(Paroles : Robert Lamoureux Musique : Henri Bourtayre 1954)

Y a des gens qui s’battent qui s’battent
Pour se faire un jour un grand nom
Et qui s’battent et puis qui s’débattent
Et qui combattent sacré nom de nom

Refrain
On devrait dire à ces gens là
Mon pauvre vieux qu’est ce que tu crois ?
Tu n’es qu’un maillon de la chaîne
Tu n’es qu’un moment de la vie
Un moment de joie de misère
Et puis on t’enterre et puis c’est fini
Un moment de joie de misère
Et puis on t’enterre et puis c’est fini

Y a des gens qui luttent qui luttent
Pour devenir de gros potentats
Et qui luttent et puis qui se disputent
Et puis qui culbutent sacré nom de d’là

Refrain

Y a des gens qui peinent qui peinent
Pour gagner beaucoup de gros sous
Et qui peinent et puis qui se démènent
Et puis qu’on amènent un soir dans un trou

Refrain

J’aime bien cette chanson qui était interprétée notamment par Mouloudji.

Test

Vendredi 31 janvier 2003

Parfois je fais des tests.

Via a crow

Wolf
Wolf

What Is Your Animal Personality?
brought to you by Quizilla

8 grues à l’horizon

Jeudi 30 janvier 2003

Tout ce qui brille n’est pas or mais ce qui est beau c’est que ça brille pas que ce soit de l’or, comme la poussière qui brille dans un rayon de soleil, les étoiles ou les lumières de la ville la nuit. Ca me fait penser que je crois que le phénomène de cristallisation cher à Stendhal se vérifie de manière beaucoup plus étendue qu’il ne l’écrivait. Je ne saurais vous raconter l’association d’idées qui mène de la première à la deuxième phrase.

Les choses

Mercredi 29 janvier 2003

J’ai des livres et des disques. Beaucoup, plus qu’il n’est nécessaire sans doute. Plus qu’il n’en faut pour changer chaque jour. Parfois je me demande à quoi ça sert ? Cette accumulation a sans doute des vertus rassurantes. Pourtant il n’y a pas que ça. J’en reviens à la phrase de Rilke devenir un monde, pas pour soi, pour un autre. Toutes ces choses entassées ici (ce n’est pas vrai, elles ne sont pas entassées, j’ai des étagères) elles ne sont pas pour moi. Elles sont pour d’autres. Ce sont des balises. C’est mon chemin. Elles ne serviront jamais autant ni mieux qu’à être découvertes par d’autres, qu’à nous réunir et nous lier.

Relativisons

Mercredi 29 janvier 2003

Voltaire a écrit : Lorsqu’une question soulève des opinions violemment contradictoires, on peut assurer qu’elle appartient au domaine de la croyance et non à celui de la connaissance. J’incline encore plus à penser que le domaine de la connaissance, des faits objectifs, est très réduit. Je suis donc obligé d’admettre que j’ai des capacités non quantifiables tant elles sont faibles puisque cette toute petite somme de choses m’est pourtant inaccessible. Je suis beaucoup moins angoissé d’un coup : en étant si infime on ne peut avoir que d’infimes problèmes. CQFD

Cinéphilie

Mercredi 29 janvier 2003

Je suis allé voir Punch-drunk love de Paul Thomas Anderson. Ca faisait longtemps que je n’avais pas vu un film au cours duquel les gens quittent la salle. Bien que je n’ai pas trouvé le film inintéressant, je dois reconnaître que ce que j’ai préféré c’est le générique. Ces couleurs et ces étoiles qui glissent doucement des unes aux autres avec cette petite musique qui ressemble à une berceuse. En fait j’aurais bien aimé une heure et demie de ça.

Smoking / no smoking

Mercredi 29 janvier 2003

Lu dans 20 minutes :

C’est la faute de votre ministre de la santé
. Le patron de la F1, Bernie Ecclestone, annoncé, hier, que le grand prix d’Autriche disparaîtrait du calendrier en 2004 en raison du durcissement de la loi antitabac dans ce pays. Ce qui signifie que si on harmonise la réglementation antitabac au niveau européen sur le modèle autrichien on met fin à la F1. Il n’est pas très fin Bernie… Bien sûr ce n’est pas comparable avec cet affreux ministre de la santé empêcheur de tourner en rond, au sens littéral en l’occurrence.

Lundi 27 janvier 2003

Choses qu’on dit la nuit entre deux villes, Francis Dannemark

Au fond, on les aime bien, les fous du travail qui bossent deux fois plus que tout le monde, les obsessionnels qui ont le goût du rangement, les frustrés qui n’osent jamais dire non et qui feraient cinquante bornes dans la neige pour aller rechercher la valise qu’on a oubliée - juste pour se faire aimer, comme des chiens, parce que c’est mieux que pas d’amour du tout. On pourrait leur dire d’arrêter ce cirque, merde, qu’on les aime sans ça - mais qui est-ce qui irait rechercher la valise ? Qui ?

J’ai l’impression, pas forcément agréable, que je suis peut-être un peu frustré. Bien entendu je m’en défends vigoureusement mais face à cette phrase ce n’est pas évident. Heureusement que je lis dans ma tête depuis longtemps.

C’est le temps qui passe qui apportera la solution, quand assez de gens auront vraiment souffert d’être bêtes à ce point.

Je me le dis souvent ça. Ce qui est très important c’est de s’en tenir là et de ne surtout pas poursuivre le raisonnement plus avant (si vous vous demandez dans combien de temps ? c’est raté).

Mais le bon sens c’est comme le sens de la mesure : c’est mal coté.
Le pire, c’est la bureaucratie, la lourdeur incroyable de nombreuses administrations. A moins qu’on n’envoie sur Mars les colonies de fonctionnaires excédentaires, le problème va s’aggraver. Le bon côté de l’histoire, c’est quand on se dit que si la bureaucratie a pu avoir raison du communisme, elle a des chances de faire tomber aussi le capitalisme.

Voilà une bonne nouvelle. J’ai toujours été convaincu instinctivement que la bureaucratie était indispensable. (Ceci dit, plus sérieusement, heureusement qu’il y a l’Etat pour offrir des emplois parce que sinon le taux de chômage serait nettement plus important étant donné qu’il est acquis que la qualité de vie des gens et notamment leur intégration dans la société par l’emploi ne fait pas partie des préoccupations des thuriféraires du capitalisme. On arrive à se passer de main-d’oeuvre de mieux en mieux, si seulement on pouvait trouver une solution pour se passer de consommateurs ce serait le paradis sur Terre… (oui, oui j’ai conscience de caricaturer mais c’est peut-être parce qu’à mon sens l’essentiel n’est pas d’être le plus productif possible mais de parvenir à occuper et à faire participer tout le monde))

Le lundi au soleil

Lundi 27 janvier 2003

Aujourd’hui, le 27 janvier, l’hiver s’est fêlé. Tout le monde s’est engouffré dans la brèche. Il faisait trop beau pour rester à l’intérieur. Un soleil de printemps semble s’être égaré au milieu du ciel très bleu. Je ne prends même pas mon écharpe. Je vais jusqu’à la Seine en bus. Place Valhubert les chemineaux du Pont d’Austerlitz sont remontés sur la rue pour se réchauffer un peu tandis que les cheminots continuent leur train-train. Je traverse la place en biais. J’aperçois la façade imposante du meseum d’histoire naturelle et je pense au grand mammouth qui setrouve à l’intérieur. Je descends sur le quai Saint Bernard. Il fait doux, c’est agréable. Sur une péniche un homme étend son linge. Il ne porte qu’un tee-shirt avec les manches coupées. Il y a des amoureux qui marchent derrière moi. Je remonte le quai en contournant les petits amphithéâtres. La Seine se balance doucement. En face du square Barye qui se trouve à la pointe en amont de l’île Saint-Louis le quai est plus bas, exactement au niveau de la Seine aujourd’hui. Elle vient doucement lécher les pavés. Je m’assois pour regarder l’eau aller et venir, semble-t-il en un même mouvement, une caresse très fluide qui glisse à mes pieds. Assis ici je suis à l’ombre. Je pourrais rebrousser chemin de quelques pas pour passer sur la portion de quai supérieure mais essayer de traverser la partie inondée est trop tentant. Difficile de dire s’il y a un ou cinq centimètres d’eau, cela doit dépendre des endroits et de la vigueur des caresses. Je me surprends à me retourner pour vérifier que personne ne va me surprendre. Il faut être enfant pour traverser ainsi une grosse flaque. Je fais un premier pas, puis un deuxième. Ca glisse un peu, une fine couche de dépôt recouvre les pavés. Le quai doit être recouvert d’eau depuis un petit moment. J’aperçois une péniche qui arrive. Je ne dois pas traîner pour atteindre l’autre côté. Comme je le pensais la profondeur n’est pas uniforme. J’arrive fièrement de l’autre côté. Mes chaussures ne sont pas trop mouillées. Je me demande si la vieille dame que je croise ne m’a pas vu. Je continue de marcher. Les péniches sagement amarrées se balancent doucement au gré de la Seine. Il y a cette péniche au pont couvert de plantes que je vois souvent. Sur le quai d’en face les superbes immeubles anciens, qui abritent les non moins anciennes grandes familles parisiennes, réchauffent leurs vieilles façades à ce soleil inattendu. J’aperçois même des stores baissés. La mairie de Paris apparaît au bout du bras entre Saint Louis et la Cité. Notre Dame, majestueuse, semble remplir l’espace. Les oiseaux tournent et virent. Les mouettes se sont alignées sur le mur du mémorial de la déportation. Je remonte l’escalier du bureau des Bateaux parisiens. Sur le boulevard Saint Michel il y a beaucoup de monde, comme toujours. Les gens sont prompts à profiter d’un rayon de soleil. Les tenues sont plus légères, il y a des tables en terrasse. Le jardin du Luxembourg est noir de monde. On dit souvent qu’une saison reviendra, l’été reviendra. Je me demande si c’est la même saison qui revient chaque année ou bien une nouvelle à chaque fois ? N’y-a-t’il que quatre saisons qui se succèdent années après années ou bien est-ce que chaque printemps est un nouveau printemps ? Doit-on dire adieu à cet automne qui s’achève ? C’est comme avec les gens il y en a qu’on regrette plus que d’autres, certains qu’on ne regrette pas du tout. Retrouve-t-on l’hiver, ce vieil hiver qui maltraitait déjà nos grands-parents ou bien est-ce un nouvel hiver, aussi vierge que sa neige est blanche qui nous éreinte et nous transit ? Pour l’heure ce lundi de janvier est digne d’un dimanche d’avril. Je traverse le parc de part en part et ressort face à la rue de Fleurus. Je tourne à gauche pour récupérer la rue Vavin et marche jusqu’au boulevard Montparnasse puis jusqu’à Port Royal. Je suis un peu fatigué. Le soleil aussi. Orion commence à transparaître du ciel mauve.