Bon je m’étais dit que je n’achetais plus de CD (ou alors vierges, mais pas trop quand même) mais j’ai craqué. J’ai acheté le dernier du Brian Setzer Orchestra. C’est d’autant plus grave que c’est un disque saisonnier et que je ne l’écouterai sans doute plus d’ici un mois mais bon ça va swinger (cf le titre ci-dessus).
Dans le métro j’ai regardé les gens : tout le monde a des cernes. C’est fatigant le mois de décembre. A l’époque où j’avais encore des cours je me souviens que c’était le mois que je trouvais le plus fatigant. J’arrivais épuisé aux vacances. Dans la rue j’ai vu un side-car avec deux petits enfants dedans. Ils étaient tout emmitouflés sous la capote et devaient bien rigoler tout les deux au milieu des embouteillages du boulevard Saint-Germain. Je suis rentré dans la toute nouvelle (tellement nouvelle qu’elle n’est pas encore totalement aménagée) FNAC Digitale. C’est bôôôôôô… On dirait presque de la science-fiction tellement la concentration de technologie est importante. On y trouve une multitude de jouets superbes. La vraie difficulté est de choisir, dans la mesure de ce qu’on peut s’offrir. Pourtant à regarder tout ça j’ai éprouvé une sensation de futilité. D’aucuns me trouveront difficile et rabat-joie. Pourtant c’est vrai : oui moi aussi j’ai envie de jouer avec tout ça mais combien de temps ? D’autant plus que maintenant il n’y a plus grand chose qui ne soit pas dépassée au bout de six mois. Et puis encore faut-il avoir le temps. Enfin bref j’arrête là sinon je suis parti pour un couplet sur la société de consommation (c’est vrai que le temps passé à apprendre à se servir de tout ça est du temps qui n’est pas passé à se demander ce qu’on fait là et à s’angoisser ; la consommation en général a des vertus anti-dépressives).
Swatch a décliné une gamme de montres ultra-plates baptisées thin, on n’aurait pu choisir nom plus adapté. Les boîtes de CD sont aujourd’hui réduites au stricte minimum et dites thin case. Les téléphones et ordinateurs portables, walkmans (tous supports confondus), appareils photos numériques, camescopes sont eux aussi toujours plus thin. A l’heure où la compression numérique se fait de plus en plus efficace cette thinisation est un peu ridicule. Le matériel poursuit l’immatériel en vain. En effet, il est tout à fait impossible de parvenir à des gains de place du même ordre. A l’extrême on pourrait envisager une réduction de nos mains, solution dont la pertinence me laisse perplexe et pas seulement d’un point de vue esthétique. On nous explique que la taille moyenne des êtres humains augmente régulièrement, ce dont je déduis, peut-être audacieusement, que leurs mains s’allongent proportionnellement (je ne m’inclus pas car je ne suis pas très grand, je risque donc de faire baisser la moyenne et, en plus, j’ai plutôt des petites mains). Dans le même temps on réduit la taille des appareils, principalement à forte valeur technologique, donc ayant, a priori, un futur prometteur (non, non je ne reviendrai pas sur la FNAC digitale, allez vous faire une idée par vous-même). Il n’y aura plus que les enfants à pouvoir physiquement les utiliser. Au fond ça tombe bien ce sont les nouveaux et les futurs rois de la consommation. Au-delà de ce problème pratique, auquel la mise au point de la commande vocale palliera sans doute, à quoi bon gagner de la place sans arrêt ? Pour vivre dans des habitations plus petites, des alcôves de ruche comme au Japon ? Pour être encore plus entassés que nous ne le sommes déjà ? Je me demande pourquoi on ne consacre pas l’énergie et le temps dépensés à miniaturiser tous les appareils (je ne parle même pas de ce que coûte, tous éléments confondus, tout ce qui touche aux questions militaires) [EDIT (car erreur de manipulation et phrase amputée)] pour rendre habitables toutes les régions invivables en l’état, et au passage améliorer la condition des gens qui vivent autour…
Un Concorde de la British-Airways a perdu une de ses gouvernes, ce dont l’équipage ne s’est aperçu qu’à l’aterrissage, qui s’est heureusement déroulé sans encombres. Un spécialiste du Concorde interrogé à ce sujet s’est montré très rassurant : Le Concorde n’est pas plus dangereux que les autres avions. L’égalité règne dans l’aviation civile : on a autant de chances de se planter avec un avion normal qu’avec le Concorde !
Je crois que j’ai des tendances manichéennes assez marquées. Je perds parfois le sens de la nuance. Un exemple : si je ne sais pas tout, je ne sais rien. Alors qu’on ne peut pas être bon partout. On est généralement plutôt doué pour un truc ou deux et assez mauvais, voire totalement nul, partout ailleurs. Ce qui compte c’est d’essayer et de faire de son mieux. Je peux le dire mais je l’oublie facilement. Barbara me dit : tu es très dur avec toi même. Même si je me plains (un peu, enfin pas trop) je déteste l’auto-apitoiement. En fait j’éprouve de réelles difficultés à m’exprimer. Non pas à m’exprimer dans la forme mais dans le fond. J’ai beaucoup de mal à exprimer fidèlement ce que je pense, et je ne parle pas même pas de ce que je peux ressentir. Dès lors que je veux exprimer ce que je pense une barrière se forme indépendamment de ma volonté et me paralyse. Bien sûr ce n’est pas systématique mais c’est fréquent. J’enrage car après coup ou (surtout) lorsque je suis extérieur à une situation, que je ne suis que spectateur je n’ai pas ce problème et je ne perds pas mes idées ainsi. Combien de fois ai-je littéralement perdu des idées sitôt devant une feuille blanche ou devant la personne à qui je voulais parler alors même qu’elles m’apparaissaient très clairement une minute avant. A l’écrit ce n’est pas le pire, au contraire, je suis plutôt à l’aise, sauf quand je panique, c’est à dire essentiellement durant des examens, comme le dernier en date. Dans ce cas-là j’écris n’importe quoi. Je suis allé à une reddition vendredi pour voir ma copie. A la relire et à discuter avec le correcteur qui était présent je ne peux que m’incliner (même s’il est quand même très très pointilleux ; je vous donne un exemple pour que vous ne croyez pas qu’il s’agit simplement de rancoeur : Application et mise en oeuvre ça ne veut pas dire la même chose, vous ne pouvez donc pas annoncer et parler de l’autre). Bref, je me suis ramassé pour avoir paniqué. Si je lisais ça de la part de quelqu’un d’autre je me dirais effectivement que la personne passe à côté. Lorsque j’ai quelqu’un en face de moi c’est aussi de la panique (toutefois il faut relativiser le terme panique, en général le seul signe est que je devrais dire quelque chose et que je ne le dis pas, c’est à l’intérieur que je sais que ça ne va pas). Pourtant durant les oraux (assez nombreux) que j’ai pu passer la panique était stimulante, tout le contraire de l’écrit. Non, la situation typique c’est évidemment lorsque je suis face à une fille qui me plaît. Je ne sais pas le dire ou très mal. Je suppose que c’est ça un manque de confiance en soi. Ce qui me ramène au tu es très dur avec toi même de Barbara (oui ça fait un détour un peu long…). Je ne m’aime pas beaucoup. On me dira : comme la plupart des gens. Seulement je n’ai pas pris cet élément en compte pendant longtemps, et puis ce n’est pas forcément une très grosse consolation. Cependant j’ai des moments où je m’aime bien. Parfois je fais des trucs pas mal mais il faut reconnaître que depuis quelques temps ce n’est pas ça…
En ce moment je pense beaucoup de manière schématique, en trois dimensions. Je pense sphères et polygones. Je vais vous en donner un aperçu.
Je me dis que je ne suis pas moi. Je suis ce que chacun attend. Je tends vers ce que chacun attend. Je m’adapte pour essayer de plaire à tout le monde. Dès lors il n’y a pas d’alternative, je ne peux qu’être une sphère parfaite, lisse, opaque. La forme tournée vers l’intérieur par essence, contrairement à une étoile par exemple (au sens géométrique). La sphère est aussi l’érosion à son paroxysme, quand on ne peut plus déterminer sa nature. L’érosion du regard des autres, non, de l’idée que je me fais de leur regard, de leur avis plutôt. En effet j’ai un physique très banal, ce n’est pas un problème de regard à proprement parler.
Je fais les choses à l’envers, je mets la charrue avant les boeufs. Je ne fais pas ce que je veux quitte à provoquer l’insatisfaction des autres mais au contraire je m’efforce de faire ce que les autres attendent (heureusement ce n’est tout de même pas trop prononcé) ou bien je veux une chose mais je me demande comment l’obtenir seulement après alors qu’il serait plus logique, raisonnable aussi sans doute, de se demander ce je peux obtenir avec ce que j’ai (ah quelle terrible notion que celle de budget mais qui est si indispensable). Le gros risque étant la frustration. Je veux tout et tout faire mais ce n’est pas possible. Ce qui est gênant c’est que je ne fais quasiment rien, trop occupé à me demander si la chose sur laquelle je vais me concentrer sera la bonne. Qu’est-ce que ça veut dire la bonne ?… Celle qui me vaudra la considération des autres. :o/ La solution serait de tout faire alors je me disperse dans tous les sens et je ne m’applique à rien. C’est un cercle vicieux. Le fait de le mettre à plat est peut-être un début pour changer de comportement en la matière.La question est : qu’est-ce que je veux faire ? Etrangement je n’ai jamais trop su y répondre, du moins je n’ai jamais su répondre à cette question terrifiante qu’on assène aux enfants : que veux-tu faire dans la vie ?
Je suis capable d’avoir des réactions qui me semblent normales, naturelles, appropriées, que je conseillerais (même si les conseilleurs ne sont pas les payeurs, ils seraient même plutôt les payés dans notre société) ainsi qu’à les exprimer (comme supra je parle du fond pas tellement de la forme) à peu près correctement à travers un écran. Choses que je fais assez mal en vrai. S’il y a une part de psychologie en jeu il y a également semble-t-il une part physique, au sens propre. Je ne pense pas à mon physique mais à la relation physique, au contact physique et même à la présence. Je me demande pourquoi.
Intimité vient du latin intimus qui est le superlatif de interior. C’est donc ce qu’il y a de plus intérieur, de plus profond, de plus secret et, peut-être, de plus fragile. C’est l’essence (de essencia, de esse, être ; non, je ne me rappelle pas parfaitement de mes cours de latin, j’ai un dictionnaire). Il y a des parts, des faces plus fragiles chez chacun. Il y en a qu’on peut présenter à n’importe qui, qui sont en quelques sortes accessibles à tous, et d’autres, au contraire, dont on ne veut ou même dont on ne peut permettre l’accès qu’à une ou des personnes choisies. L’intimité c’est beau quand c’est partagé. C’est la rencontre, l’ouverture et le contact des faces fragiles, des faces secrètes (des piles quoi), c’est offrir son monde à un visiteur respectueux, admiratif, précautionneux, qui peut se transformer en habitant et réciproquement. C’est sans doute pour ça que si bon et si important de partager un secret, c’est une petite intimité.
J’ai toujours été très intrigué par les lumières la nuit, les fenêtres éclairées au loin. J’ai toujours vécu en ville et j’ai longtemps eu peur du noir, bien que mes grands-parents vivaient alors déjà au fin fond d’une campagne où la nuit est noire comme de l’encre et que j’y passais de nombreuses vacances tous les ans. Qui sont ces gens derrière toutes ces fenêtres ? Que font-ils ? Nous sommes tant que ça ? J’aimais aussi beaucoup les enseignes lumineuses au sommet des immeubles, les lumières oranges qui défilaient à toute vitesse dans les tunnels du périphérique, les lumières qui clignotaient un peu partout. Pour moi le symbole de la présence humaine la nuit c’est une lumière qui clignote, peut-être par analogie avec un battement de coeur. Pas une lumière fixe, un clignotement.
Ce qui précède est déjà très fouillis mais je crains que la fin ne rattrape pas l’ensemble…
Il y a des choses que je vois ou que j’entends, mais que je ne vis pas directement (radio, télé, journaux, net…) qui m’énervent, qui m’agacent, qui m’exaspèrent, que je trouve nulles, déplacées, méchantes, mauvaises mais je n’en parle pas. Je ne veux pas en parler car je ne veux pas leur donner d’écho. Le silence finira par les happer.
Je l’ai déjà citée mais je recommence parce qu’elle est sublime cette phrase de Saint Augustin : Nous chercherions donc comme si nous allions trouver mais nous ne trouverions jamais qu’en ayant toujours à chercher.