Comme en Utopie
Au détour d’une nouvelle d’Eric Holder, Alice Donitz, je lis le mot sondéen. Ce mot au milieu d’une page, comme un caillou dans le lit de la rivière, a accroché mon regard. Pourquoi tel caillou parmi tant d’autres ? Pourquoi tel mot ? Comme un certain angle fait ricocher un rayon de soleil et donne un éclat particulier à ce caillou une certaine prédisposition de mon esprit a donné un certain éclat à ce mot et l’a fait se détacher du texte. Eric Holder n’écrit pas des aventures géographiques mais humaines. Il n’est pas besoin d’aller au bout du monde pour trouver l’émotion. Aller jusqu’à son voisin est une aventure. Sondéen est un peu surprenant dans ce contexte.
Sondéen… je ne crois pas l’avoir déjà croisé ce mot. Pourtant il fait écho en moi. Je pense immédiatement aux îles de la Sonde. Pas les vraies, pas celles que je ne saurais précisément inscrire sur une carte. Non. Celles de la chanson* de Gérard Manset. Celles rêvées. Celles qui sont de ces lieux qu’on ne reconnaîtrait pas si on y allait. Ces lieux imaginés, fantasmés à partir d’une photo, de quelques mots, d’un parfum. Ces lieux dont on ne partage que le nom comme une rengaine mystique tant chacun s’en est forgé sa propre représentation. Ces lieux dont doit regorger le dictionnaire des lieux imaginaires que je vois souvent sur les présentoirs et que je n’ai jamais pris par peur de m’y perdre mais dont je sais aussi depuis la première fois que je finirai pas l’avoir un jour ou l’autre. Il doit falloir le lire à deux, un peu comme Robinson et Vendredi, pour partager plus qu’un nom, pour les imaginer ensemble ces lieux.
* Les îles de la Sonde
T’as pas vu les îles de la Sonde
Les poissons volants qui retombent
Sur le fond de la barque ronde
T’as pas vu les îles de la Sonde
T’as pas vu les îles de la Sonde
Les femmes aux sourires de Joconde
Comme au premier matin du monde
T’as pas vu les îles de la Sonde
Mais tu peux partir quand même
Y’a les poissons qui t’emmènent
Poissons d’argent
Poissons volants
Poissons de feu
Poissons de glace
Poissons aux ongles qui cassent
T’as pas vu les îles de la Sonde
Elles t’attendent à l’autre bout du monde
Moitié dans l’eau, moitié dans l’ombre
Moitié dans l’eau, moitié dans l’ombre
Mais tu peux partir quand même
Y’a les poissons qui t’emmènent
Poissons d’argent
Poissons volants
Poissons qui plongent
Poissons qui nagent
Poissons venus du fond des âges
Poissons aux longues chevelures
Dauphins bleus sur fond d’azur