Un été travesti
Durant cet été travesti, j’ai souvent pensé à ces quelques lignes extraites des Leçons particulières de la pianiste Hélène Grimaud :
Comment lui expliquer, dès lors, que je n’avais rien tu, mais tout dit ? Que ma vie, toute ma vie était exposée, que j’avais choisi d’aimer à la lumière de midi. Que c’est en n’ayant plus de secret, plus rien à cacher, en étant peint aux couleurs du monde, en agissant toujours dans la lumière crue du grand jour, que nous devenons nous-mêmes un secret. Le grand secret, c’est quand on n’a plus rien à cacher et que personne alors ne peut vous saisir.
Alors, tout devient mystère.
Le paradoxe apparent qu’elle décrit m’intrigue mais je crois néanmoins comprendre.
Quoique pour vivre heureux, vivons cachés comme dit le proverbe, c’est vainement que l’on chercherait à dissimuler son mystère dans l’ombre, comme un silence dans une symphonie.
J’ai rencontré un paradoxe apparent semblable il y a peu.
La volonté de tout maîtriser dans laquelle se drape l’espoir aussi faussement secret que vain d’échapper à la mort.
La maîtrise totale aboutirait à la même immobiliité complète et définitive.
On ne peut pas échapper à la mort mais seulement à la peur qu’elle suscite et l’on ne peut jamais y parvenir qu’en vivant, en acceptant le mouvement de la vie qui échappe à toute maîtrise humaine.
Peut-être est-ce la raison pour laquelle l’homme est parti à la recherche de Dieu.
Comme j’avais apprécié l’écriture drue et précise d’Hélène Grimaud qui me rappelait un peu celle de Michel Tournier, j’ai lu son autre ouvrage, le premier chronologiquement, intitulé Variations sauvages dans lequel elle cite Dostoïevski dont elle est manifestement une fervente adepte :
La douleur n’est pas le lieu de notre désir mais de notre certitude.
Je n’ai guère dû lire qu’une ou deux nouvelles ou courts romans de Dostoïevski mais cette citation suscite chez moi un vif intérêt.
En outre, cette phrase résonne en écho à ce que je viens d’écrire.
Enfin, au cours de cet été travesti :
j’ai allumé un cierge,
j’ai vu un troupeau de chars d’assaut,
j’ai écrit une lettre de fan,
j’ai été profondément ému par le film Emma’s glück et en particulier par l’interprétation de son actrice principale,
des eaux de la Méditerranée, de la Manche et de la piscine dans lesquelles je me suis baigné, la plus froide n’était pas celle que l’on aurait cru,
j’ai rêvé de deux femmes qui avaient repoussé mes avances il y a quelques mois et quelques années.